Comment la technologie peut-elle améliorer les performances de votre anatomie?
Réponses en images interactives ( À voir sur le site ) avec quelques-unes des «MedTech» belges les plus prometteuses, et leurs applications sur le corps humain. Par Serge Quoidbach & la rédaction du Tijd | 25 novembre 2021 Coordination: Clément Bacq, Développement et images 3D: Benjamin Verboogen.
Le cerveau
L’enjeu: Les maladies neurodégénératives ou les accidents vasculaires cérébraux laissent les patients cérébro-lésés dans un état de dépendance aigu vis-à-vis de leur entourage, exigeant une attention particulière de tout moment. Or, les patients ne peuvent consulter qu’une ou deux fois par an leur neurologue.
Nos entreprises impliquées: Le projet NeuroInsights parrainé par l’entreprise NeuroPath, basée à Louvain-la-Neuve, permet de suivre dans son quotidien le patient atteint de la maladie de Parkinson.
Il développe une plateforme intelligente composée de capteurs de mouvements, d’analyse de voix et de diverses informations émergeant de son activité. Le système connecté enregistre les données et permet de suivre la progression de la maladie, permettant à l’entourage d’adapter le parcours de soins pour une meilleure qualité de vie.
En parallèle, le projet Axinesis permet pour les patients cérébro-lésés de développer chez eux des exercices de télérééducation sous forme de jeux et de stimulations de mouvements via une plateforme digitale. Un outil particulièrement utile durant la crise sanitaire, au moment où les patients n’ont pas pu venir physiquement à leur consultation.
Mais aussi, pour mieux comprendre le fonctionnement de notre cerveau, nous avons besoin d’instruments plus puissants.
Le centre de recherche Imec de Louvain – expert en nanotechnologie – est un leader mondial dans le développement d’une nouvelle génération de mini-implants cérébraux. Ceux-ci peuvent récolter beaucoup plus longtemps des mesures et à deux fois plus d’endroits que ce qui était possible auparavant. Les prototypes sont actuellement testés sur des animaux.
En outre, l’institut flamand NERF – une collaboration entre l’Imec, la KU Leuven et le centre de biotechnologie VIB – travaille sur un microcathéter permettant d’introduire du liquide dans le cerveau.
Au bout de la sonde se trouve une pièce imprimée en 3D dont les pores sont 400 à 500 fois plus petits qu’un millimètre. Cela permet d’introduire les médicaments de manière beaucoup plus ciblée et localisée. Cela devrait conduire à une percée dans le traitement du cancer du cerveau.
L’œil
L’enjeu: Le glaucome est une maladie attaquant le nerf optique de l’œil et qui provoque une réduction irrémédiable du champ de vision. C’est la deuxième cause de cécité dans le monde. Il est normalement traité par l’administration de gouttes oculaires sans que cela ne permette, dans de nombreux cas, de réduire la perte de vision.
Nos entreprises impliquées: Istar Medical, société basée à Wavre, a développé un implant ophtalmique, un dispositif que l’on introduit dans l’œil pour permettre le drainage de l’œil et combattre ainsi le glaucome. L’entreprise vient de recevoir l’aval de la FDA pour lancer une étude clinique aux États-Unis. EyeD Pharma travaille également sur un implant intra-oculaire en polymère. Il libère lui-même la quantité prédéterminée de médicament par jour.
Les voies respiratoires
L’enjeu: L’apnée obstructive du sommeil touche près d’un milliard de personnes et est largement non diagnostiquée.
Elle est causée par le glissement momentané de la langue sur les voies respiratoires, ce qui augmente de façon importante le risque de maladies cardiovasculaires et de répercussions neuropsychiatriques, sociales et professionnelles.
Nos entreprises impliquées: La société Nyxoah a développé un implant de la taille d’une pièce de monnaie, à placer par une petite incision sous le menton.
Cet implant agit comme un neurostimulateur, qui redresse la langue avant qu’elle n’obstrue les orifices respiratoires. Cotée à Bruxelles, l’entreprise a été introduite en bourse aux États-Unis et attend de la FDA l’autorisation de mise sur le marché pour son système appelé Genio.
Le système de la société namuroise Sunrise est moins invasif mais ne fait, pour l’instant, que détecter les troubles du sommeil. Déjà en vente, ce capteur intelligent de 3 grammes, posé sur le menton, analyse les micromouvements de la mâchoire produits par la contraction des muscles respiratoires au cours de la nuit.
Un projet encore à l’état de prototype, nommé Elisa, vise à y joindre un système thérapeutique pour stimuler les muscles de la mâchoire en microstimulations. Citons également la société liégeoise Nomics et son Brizzy, un appareil de diagnostic du sommeil qui mesure les mouvements d’ouverture de la bouche. Utilisé sur des milliers de patients, il a généré une base de données qui permet de faire des profilages types de l’apnée.
Le cœur
L’enjeu: L’infarctus du myocarde détruit une partie du muscle cardiaque. Il se produit après l’obstruction d’une artère coronaire irriguant le cœur.
Après un infarctus du myocarde aigu, 25% des patients souffrent d’insuffisance cardiaque dans les 4 ans qui suivent.
Nos entreprises impliquées: La société liégeoise Miracor a développé un système d’impulsion nommé PiCSO (Pressure-controlled Intermittent Coronary Sinus Occlusion), introduit après un infarctus du myocarde aigu dans le sinus coronaire pour réduire la taille de l’infarctus, améliorer la fonction cardiaque et réduire l’apparition d’insuffisance cardiaque après l’infarctus.
Le système est construit autour d’une console et d’un cathéter à ballonnet, introduit dans le sinus coronaire du cœur par la veine fémorale. Miracor mène un essai randomisé à l’échelle européenne, et s’apprête à commercialiser son dispositif.
Un autre enjeu: La fibrillation auriculaire (FA), le trouble du rythme cardiaque le plus courant, augmente le risque de formation de caillots sanguins dans le cœur et provoque un accident vasculaire cérébral sur cinq.
En détectant et en prédisant à un stade précoce qu’une personne va développer une FA, il est possible de prévenir efficacement les crise cardiaque. Toutefois, cela se produit rarement car les personnes à risque ne présentent que peu ou pas de symptômes.
Nos entreprises impliquées: L’hôpital Oost-Limburg de Genk prend les devants en utilisant l’apprentissage automatique pour détecter les risques beaucoup plus rapidement. Le cardiologue Pieter Vandervoort – également rattaché à l’université de Hasselt – a mis en place un projet avec l’équipe chargée des données de l’hôpital et certains partenaires externes afin de prédire, à partir des données de centaines de milliers d’électrocardiogrammes (ECG), quels patients développeront une FA.
M. Vandervoort a également été l’un des cardiologues à l’origine de l’application belge de dépistage cardiaque Fibricheck. Cette application vous permet de surveiller la santé de votre cœur via votre smartphone et votre smartwatch.
Le sein
L’enjeu: Les cancers du sein «triple négatifs» sont l’une des sous-formes les plus agressives de la maladie. Ils représentent près de 10% des cancers du sein en Belgique, et touchent particulièrement les jeunes femmes.
Leur caractéristique est l’absence de récepteurs hormonaux et un type de protéine, la HER2, généralement présente dans d’autres types de cancers du sein.
Par cette absence, ces cancers ne sont pas éligibles aux traitements traditionnels, notamment à l’hormonothérapie ou aux traitements anti-HER2. Vu cette caractéristique et leur forme agressive – donc à développement rapide – il est important de les diagnostiquer au plus vite.
Nos entreprises impliquées: Le projet TreatBest, soutenu par le pôle santé wallon BioWin, réunit deux sociétés: IDDI et Diagenode. Le système est un kit de diagnostic in vitro qui permet de détecter la signature des cellules immunitaires entourant la tumeur et de développer le traitement le plus efficace pour chaque patiente.
L’un des grands espoirs est l’immunothérapie qui, combinée avec la chimiothérapie, augmente les chances de succès. La Belgique vient d’annoncer le remboursement de l’immunothérapie pour ce type de cancer.
Les os
L’enjeu: La pseudarthrose est une forme d’arthrose formée notamment lors d’une fracture qui n’a pas réussi à recréer une unité osseuse consolidée.
Elle génère ensuite une fausse «articulation». Elle peut aussi résulter d’une malformation congénitale.
Nos entreprises impliquées: Le projet BoneRec, financé par le pôle santé BioWin, est le résultat d’une collaboration de reconstruction osseuse émanant de trois acteurs wallons.
Un implant biologiquement actif imprimé en 3D par l’entreprise 3D-Side basée à Mont-Saint-Guibert; la propriété biomécanique est assurée par le greffon en biomatériaux céramiques de la société liégeoise Cerhum, lui-même enrichi par les cellules allogéniques de formation osseuse produites par Bone Therapeutics.
Le pancréas
L’enjeu: Plus de 460 millions d’adultes dans le monde souffrent de diabète, un chiffre qui augmente d’année en année. Le diabète est une maladie métabolique qui provoque des taux anormalement élevés de sucre ou de glucose dans le sang, entraînant de nombreux problèmes de santé.
Aujourd’hui, les personnes souffrant de diabète doivent soit mesurer leur taux de glycémie plusieurs fois par jour en se piquant le doigt, soit mettre un patch de détection sur leur bras toutes les une à deux semaines.
Nos entreprises impliquées: La start-up gantoise Indigo veut résoudre ce problème grâce à un capteur de haute technologie que les médecins insèrent sous la peau et qui surveille en permanence le taux de glycémie. Le système fonctionne avec des faisceaux lumineux ou la technologie photonique.
L’avantage du capteur est que l’utilisateur est surveillé jour et nuit et reçoit un signal si les valeurs menacent de devenir trop élevées ou trop basses. Indigo a levé 38 millions de dollars l’année dernière pour poursuivre le développement du capteur et espère le mettre sur le marché d’ici la fin de 2023.
Le gros intestin
L’enjeu: Le gros intestin contient près de 90 % des microbes du corps humain. Ils jouent un rôle majeur dans notre système immunitaire et notre protection contre les maladies.
De nombreuses maladies, comme le diabète, les maladies cardiovasculaires, la dépression, la maladie de Parkinson et le cancer, peuvent être liées à des anomalies de ce microbiome.
Nos entreprises impliquées: Les scientifiques et les entreprises de biotechnologie comme MRM Health tentent de mieux comprendre ces liens grâce à des analyses d’ADN et à des logiciels puissants. Sur cette base, ils peuvent développer de nouveaux médicaments bactériens.
La peau
L’enjeu: Notre peau et les orifices de notre corps regorgent de bactéries, dont certaines ont une importante fonction de barrière. Ils contribuent à nous protéger contre les microbes et les champignons malveillants.
Nos entreprises impliquées: L’utilisation d’antibiotiques peut détruire les bonnes bactéries. C’est pourquoi l’entreprise Yun basée à Niel près d’Anvers a développé des crèmes de soin probiotiques qui rétablissent l’équilibre de la peau en ajoutant une sélection de « bonnes » bactéries.
Le secteur des MedTech compte 17.800 employés en Belgique (en 2018, dernier chiffre disponible). Notre pays est le 6e plus gros employeur européen, devant le Royaume-Uni, la France et les Pays-Bas.
Dans la série « Technologie & Santé »:
– Sylvie Ponchaut (BioWin): « La Wallonie est une medtech valley en puissance
– Combattre la maladie de Parkinson et le cancer par l’intestin
– Philippe Peltier (Kurma Partners): « La medtech européenne avait besoin de plus d’harmonisation
Source : Ces entreprises belges révolutionnent la manière de soigner votre corps – L’Echo