En ligne gratuitement le 30 et 31 mai
Sur Operadeparis
Un enfant vêtu d’un pull rouge joue au ballon, sans lâcher aucun mot, avant de disparaître. C’est sur cette scène en apparence innocente que s’ouvre le drame historique Boris Godounov, de Modeste Petrovitch Moussorgski, d’après Pouchkine, un spectacle emblématique du répertoire russe qui aurait dû être présenté ce mois-ci à l’Opéra Bastille et qui est disponible en ligne gratuitement jusqu’au dimanche 31 mai.
Ivo Van Hove, un habitué des fresques politiques, à la Comédie Française notamment, signe ici sa première mise en scène pour l’Opéra de Paris.
Ivo Van Hove, personnalité marquante de la scène contemporaine européenne, est né le 28 octobre 1958 à Heist-op-den-Berg, commune néerlandophone de Belgique.
Le metteur en scène flamand débute sa carrière en Belgique où il met en scène ses propres créations, puis devient directeur de la compagnie du Zuidelijk Toneel, à Eindhoven aux Pays-Bas, entre 1990 à 2000. Depuis 2001, Ivo van Hove assure la direction de la troupe de 21 comédiens du Toneelgroep Amsterdam. Avec son fidèle complice le scénographe Jan Versweyveld, cet amoureux du théâtre s’est peu à peu imposé sur la scène internationale avec des œuvres et des adaptations données dans les théâtres et opéras du monde entier.
Il a reçu plusieurs distinctions dont le prix du meilleur spectacle de l’année pour « Vu du pont » d’Arthur Miller donné en version française au Théâtre de l’Odéon (Ateliers Berthier), et le Prix du meilleur spectacle étranger pour « Kings of War », un concentré de cinq pièces de Shakespeare (Henry V, Henry VI -trois pièces- et Richard III) en 4h30 présenté au théâtre national de Chaillot en 2016.
Pour Boris Godounov, il a choisi d’adapter la version originale de 1869, en sept tableaux, et non la version de 1872, la plus connue.
Le pari est relevé avec brio : dans un décor presque dépouillé, symbolisant la solitude du personnage de Boris, un tsar usurpateur accusé d’avoir assassiné l’héritier légitime du trône de Russie Dimitri, Yvo Van Hove nous plonge dans une ambiance Shakespearienne.
Dimitri est symbolisé par ce fameux enfant au pull-rouge qui apparaît dès le premier tableau et dont le spectre viendra hanter le tsar. Seuls un escalier rouge, symbole des jeux de pouvoir et un écran géant qui reflète les personnages présents sur scène, agissant comme une loupe en grossissant leurs visages et leurs actions, composent ce décor d’une extrême sobriété. L’écran montre même les émotions cachées ressenties par les personnages : il renvoie l’image d’un tsar au visage ensanglanté, se tordant les mains de douleur, à la fin de la pièce.
La force de la mise en scène de Van Hove réside aussi dans l’incursion dans la psychologie du tsar, aux prises avec le peuple qui attend tout de lui mais aussi et surtout avec lui-même. Il ne cesse de montrer un esprit tourmenté : « Moi père malheureux, dès que quelqu’un meurt on m’accuse d’être l’assassin« , se lamente-t-il, suscitant presque notre pitié.