Depuis quelques annĂ©es, une nouvelle figure de la mobilitĂ© humaine semble gagner en visibilitĂ© dans lâespace entre les pays europĂ©ens dâimmigration et les pays dâĂ©migration du Maghreb.
Il sâagit des enfants des « travailleurs immigrĂ©s » postcoloniaux des annĂ©es 1960 et 1970.
Ces populations sont nĂ©es dans un pays europĂ©en dont elles ont acquis la nationalitĂ©. Elles y ont grandi, y ont Ă©tĂ© Ă©duquĂ©es et formĂ©es, y ont rĂ©ussi un parcours dâinsertion socioĂ©conomique et professionnelle, et leur socialisation politique et culturelle sâest faite dans le cadre du systĂšme des valeurs de la citoyennetĂ© française et de ses institutions.
Du fait du droit de la nationalitĂ© du pays dâorigine de leurs parents, elles ont Ă©galement conservĂ© la citoyennetĂ© de ce dernier.
Cette seconde nationalitĂ© â leur premiĂšre nationalitĂ© reste Ă leurs yeux celle du pays oĂč elles sont nĂ©es â ne les a longtemps guĂšre concernĂ©es.
Or, parmi ces doubles nationaux de la deuxiĂšme gĂ©nĂ©ration, certains, arrivĂ©s Ă lâĂąge adulte, ont dĂ©cidĂ© dâaller sâinstaller dans le pays dâorigine de leurs parents pour y dĂ©velopper un projet professionnel, la plupart du temps en devenant des entrepreneurs indĂ©pendants….
Si ces populations ont rĂ©ussi (plutĂŽt mieux que dâautres) leur intĂ©gration socio-Ă©conomique et socioculturelle dans le pays dâinstallation, elles ont nĂ©anmoins construit un cadre dâappartenance qui englobe deux pays et dĂ©place le centre de gravitĂ© de leur citoyennetĂ©, …
Surtout, elles sont passĂ©es Ă lâacte et ont quittĂ© le pays dans lequel elles avaient « rĂ©ussi » leur intĂ©gration socio-Ă©conomique et socioculturelle.
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Pourtant, les doubles nationaux de la deuxiĂšme gĂ©nĂ©ration que nous Ă©voquons dans ce chapitre ne dĂ©veloppent que trĂšs peu de pratiques que lâon peut vĂ©ritablement qualifier de « transnationales ».
Leur projet professionnel dans le pays dâorigine reste trĂšs local et ne mobilise pas de rĂ©seaux vraiment transnationaux.
Il en va de mĂȘme de leur participation politique, peu organisĂ©e et finalement contingente par rapport Ă leurs pratiques sociales. Ă cela sâajoute une autre difficultĂ© qui tient aux prĂ©dictions du modĂšle transnational lui-mĂȘme ….
Comment faire, alors, pour comprendre les pratiques de ces doubles nationaux de la deuxiĂšme gĂ©nĂ©ration qui sâinstallent dans le pays dâorigine de leurs parents ?
Comment définir ces acteurs sociaux ?
Constituent-ils un nouveau type de « migrants de retour » en rupture avec leur intĂ©gration dans le pays oĂč ils sont nĂ©s ?
Sont-ils Ă lâinverse des pionniers de nouvelles pratiques de la citoyennetĂ© dans lâespace mĂ©diterranĂ©en ?
Ou entrent-ils dans une catégorie intermédiaire nouvelle : ni migrants car ils sont citoyens de fait comme de droit des deux espaces nationaux de référence, ni citoyens portés par une éthique de la participation transnationale, sont-ils des bricoleurs pragmatiques, visant leur réussite individuelle en utilisant les opportunités institutionnelles offertes par la double nationalité ?
Si tel est le cas, quels sont les facteurs qui dĂ©terminent le sens de lâaction de ce groupe nouveau ?
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